Notre
dernière soirée en Thaïlande fut des plus agréables.
L'implication de Deniz dans l'organisation d'échanges interculturels
AFS lui a permis de se créer un réseau d'amis(es) partout à
travers le monde. Nous sommes accueilli de belle façon par ces
amis(es) partout où notre route s'adonne à les croiser.
Deniz, Nada et ses amis(es) |
Avant de
traverser la frontière entre la Malaisie et la Thaïlande, nous nous
sommes arrêté à Hat Yai pour y rencontrer Nada, une amie AFS de
Deniz. La chaleureuse réception fut très réconfortante après la
randonnée pluvieuse de la journée passée à traverser la Thaïlande
d'ouest en est, dans sa partie sud la plus étroite.
Le
lendemain matin nous avions moins de 80 km à parcourir pour
atteindre la frontière et faire notre entrée en Malaisie. Au moment
de passer la douane Thaï nous avons réalisé que nos motos avaient
passé 2 jours de trop en sol Thaï. Pour je ne sais quelle raison
les motos ne bénéficiaient que de 28 jours comparativement à nos
visas personnels qui eux nous permettaient de séjourner 30 jours.
Les officiers en poste ont été intraitables et malgré toutes nos
innocentes plaidoiries nous avons dû acquitter les $15 de pénalité
réclamés.
À la douane malaisienne |
Quelques
mètres plus loin, les officiers malais ont rapidement estampé nos
passeports et nous ont nonchalamment fait signe de continuer notre
route sans plus de formalités, sans même noter les numéros
d'immatriculation des motos.
Attention
voyageurs : si vous traversé la frontière terrestre de la
Malaisie, exigez que les douaniers tamponnent vos Carnets de Passage
en Douane. Au moment de sortir du pays, soit à Singapour, soit par
bateau vers l'Indonésie, soit par fret aérien, l'estampe d'entrée
est obligatoirement requise. C'est en lisant les aventures d'autres
motards en vadrouille que nous avons appris ce détail primordial
pour la suite de nos péripéties.
La mosquée d'Alor Setar |
Notre
première halte en territoire malais était prévu pour Alor Setar,
petite ville côtière, pas trop loin de la frontière. Après une
magnifique randonnée à travers les dédales ruraux, en longeant
ensuite la côte autant que possible, nous sommes arrivés, par une
chaleur écrasante, dans cette cité surprenante, définitivement
musulmane. On avait soudainement l'impression d'avoir été
transporté à Istanbul en entendant le chant du muezzin provenant de
la somptueuse mosquée qui trône au centre de la ville.
Un temple chinois à Kuala Lumpur |
Deniz et Rachelle au pied d'une statue hindou |
La
Malaisie islamiste regorge de paradoxes. La nombreuse et influente
communauté bouddhiste chinoise, exilé ici au fil des
transformations de leur mère patrie, cohabite avec une presqu'aussi
nombreuse mais beaucoup moins influente communauté hindou. Les plus
grandes villes du pays à majorité malaise et islamiste, en plus
d'avoir un quartier chinois, ont aussi leur « little India »
et les temples dévoués à leurs pratiques religieuses respectives.
Pas besoin de vous dire que la diversité culturelle se reflète
aussi dans la gastronomie, mais tous carburent à fond au riz blanc.
Matin, midi, soir.
La vue de notre balcon au 35ème étage sur l'île de Penang |
Après
des mois de cavale, à loger dans des « cabanes » en bord
de mer, des « guesthouses » ou des petits hôtels
« sympa », nous avions envie de faire une pause, de
cuisiner, de se sentir un peu comme à la maison. La ville de
Georgetown située sur l'île de Penang nous a semblé un excellent
endroit pour se faire.
Le complexe |
En un temps trois mouvements, nous avions
réservé un magnifique « penthouse » agréablement
meublé et équipé, au 35ème étage d'un complexe d'habitation avec
piscine, spa, gym, et tout le tralala, pour une somme très très
très raisonnable. Mis-à-part une journée de randonnée pour faire
le tour de l'île et nos excursions quasi journalières au marché
local pour nous approvisionné en abondance de fruits et de légumes
frais, nous n'avons pratiquement pas mis le nez plus loin que le
balcon avec vue imprenable, et ce pendant une semaine complète. On a
déniché cette bonne affaire par le réseau AIRBNB. Le concept est
connu et ça fonctionne drôlement bien.
Un début de soirée ou on s'arrête pour contempler |
Sur l'île de Penang, la
ville de Georgetown, sur la côte orientale, ressemble plus à une
banlieue avec sa multitude de tours d'habitation. On se demande bien
ce qu'ils y font tous? Quelques commerces, mais aucune grande
entreprise. Rien pour occuper cette immense communauté en majorité
chinoise,
Quand
nous sommes parti de Georgetown, nous étions attendu à Kuala Lumpur
par d'autres amies AFS de Deniz : Rachelle, et sa maman.
Rachelle est née en Malaisie mais sa maman est d'origine chinoise.
Rachelle a même séjourné dans la famille de Deniz en Turquie, il y
quelques années de cela.
Impossible de ne pas visiter les tours jumelles de Kuala Lumpur |
Malgré
son exigeant travail, Rachelle nous a concocté une fin de semaine
comme une pro GO du voyage, avec un document imprimé pour
sélectionner notre programme.
Deniz, Rachelle et maman |
Même les repas étaient prévus pour
nous faire découvrir toutes les couleurs malaisiennes et les
meilleurs coins de Kuala Lumpur. J'ai dû user de savants subterfuges
pour arriver à payer une addition de temps en temps. L'hospitalité
et la générosité de cette très modeste famille m'a laissé
pantois.
La voie des motos au poste de péage: gratuit pour les 2 roues |
La
Malaisie est le plus meilleur pays au monde pour les motocyclistes.
Non seulement il y a des voies réservées aux motos sur presque
toutes les routes du pays, mais sur les autoroutes les motos ne
paient aucun péage et disposent d'une voie d'évitement séparée.
Il y a des abri exprès pour les motocyclistes pour quand la pluie se
met à tomber dru.
À Kuala Lumpur les autoroutes sont même
aménagées avec des accès différents, des panneaux de
signalisations aux sorties, des tunnels et des viaducs réservés aux
motos : c'est le summum!
Petite rue de Malacca |
La
côte ouest de la péninsule malaisienne est la plus développée à
cause du détroit de Malacca soumis encore aujourd'hui à un intense
trafic naval.
En
route vers le bout de l'Asie, nous avons fait une très agréable
pause à Malacca. La ville fut jadis le plus important port d'Asie
que les empires colonialistes se sont tour à tour disputé.
Aujourd'hui jolie cité pittoresque, capitale de la province du même
nom, le quartier chinois fais même partie du patrimoine mondial de
l'UNESCO.
Sur le pont qui mène au célèbre Marina Sand Hotel de Singapour |
Notre
objectif étant de nous rendre à Singapour pour les procédures
d'immigration de Deniz, nous nous sommes mis en contact avec des
« Couchsurfers », Singapour ayant la réputation d'être
la ville la plus dispendieuse d'Asie. C'est de cette façon que nous
avons fait la connaissance de Joséphine. Joséphine est d'ascendance
chinoise, grande voyageuse et « Couchsurfer » émérite.
Joséphine et Deniz |
Après avoir travaillé de nombreuse années à Singapour pour une
grande entreprise, elle a abandonné sa carrière pour se mettre au
voyage et elle habite maintenant Johor Baru. Un arrêt à Johor Baru
s'imposait avant de traverser le pont. Dernière grande ville
malaisienne au bout de la péninsule, elle déverse chaque jour des
milliers de malais qui vont s'occuper des tâches ingrates aux yeux
des singapouriens. Les deux ponts qui relient Singapour au continent
servent aussi de douane que doive traverser, passeports en main, tous
les travailleurs qui n'ont pas les moyens de vivre sur l'île-ville.
La super ville (avec le super gars et la super moto) vu du port |
Nous
avons aussi appris que n'entre pas qui veut à Singapour. On subit
d'abord le même examen qu'avant d'embarquer dans un avion. Il faut
ensuite être prêt à débourser une bonne somme d'argent pour y
circuler avec son propre véhicule. Impossible de se présenter à la
douane et de penser traverser tout bonnement.
Singapour downtown le soir |
Si on est pas résident,
il faut au préalable se procurer des assurances locales et un Permis
de Circulation International, qu'on ne peut obtenir que via
l'Association Automobile de Singapour, située... au cœur de la
ville. Le permis n'est pas exorbitant ($52) mais les assurances
elles! Pfouuuu! Minimum 1 mois ($187) et pour dommages au tiers
seulement! Ce n'est pas tout. Il faut aussi la petite carte à puce
qui permet de passer les péages ($10 rechargeable bien sûr). Jusque
là c'est cher mais faisable. Comme on ne prévoyait pas y séjourner
plus qu'une semaine, et pour limiter les dépenses, Deniz a accepté
de laisser sa monture chez Joséphine à Johor Baru et de monter
derrière moi : c'est dur parfois la vie!
Au
moment de traverser, les officiers de douane étaient stupéfait de
constater que nous avions bel et bien TOUS les documents requis. On a
même été traité en VIP puisqu'on a dû emprunter la voie de la
zone cargo pour estamper le Carnet. Ils en voient pas beaucoup des
motards qui s'aventurent aussi loin!
Le Marina Sand devient un spectacle de lumière le soir venu |
À
Singapour, on n'a pas trouvé de « Couchsurfer » pour
nous héberger pendant une semaine. On a encore fait appel à AIRBNB
et trouvé une chambre abordable dans une maison accueillante.
Cecilia, une minuscule singapourienne de 48 ans qui n'en paraît que
32, tient presqu'une auberge dans son appartement situé à Katong,
un chic quartier à 10 minutes du centre-ville. Je crois qu'on l'a un
peu contaminé avec l'idée de voyager et qu'on a aussi transmis le
virus à Shane, le co-loc américain.
Entendons-nous
que le pays de Singapour est une île, mais surtout un gros
centre-ville. Dans le but de restreindre la circulation automobile le
gouvernement impose des mesures très coûteuses. Tous les accès de
la ville sont parsemés de « portiques » électroniques
(ERP) qui collectent les utilisateurs aux heures de grandes
affluences. Tous les véhicules sont munis d'un émetteur qu'on doit
approvisionner en argent. Pour ce qui est du stationnement, quand on
arrive à en trouver un et ce même pour les motos, c'est à des
tarifs faramineux. Interdit de se stationner sur la rue! Il faut donc
être très très bien nantis pour avoir le privilège de circuler à
Singapour. La dissuasion financière est efficace, mais on peut
s'interroger sur l'aspect discriminatoire de telles mesures. On ne
voit pratiquement que des voitures de luxes sur les rues. Est-ce donc
dire que le réseau routier « publique » n'est accessible
qu'aux seules personnes les plus fortuné? Pour les résidents de
Singapour qui désirent posséder un véhicule, il leur faut d'abord
obtenir un permis pour en acheter un : $100 000 pour une voiture
neuve, $10 000 pour une voiture usagée. Oui vous avez bien lu :
c'est le permis qui coûte ce prix là. Ça n'inclus pas la voiture
ou la moto ou … ce que vous voudrez.
La ville est bien sûr
magnifique, bien entretenue, desservie par un excellent système de
transport en commun, mais ressemble à un gros centre financier,
couverte de gros centres commerciaux climatisés, aseptisée et pas
du tout invitante, à moins bien sûr de vénérer l'argent...
Avant
de quitter Singapour il fallait retourner le Permis de Circulation et
faire endosser le Carnet par l'AAS. Comme les douaniers n'avaient pas
estampé la bonne feuille à l'entrée, on a dû attendre plus d'une
heure que les préposées de l'AAS s'entendent avec les douaniers
pour corriger l'erreur de procédure, et repasser par le même poste
de douane.
En constant développement ce géant de la finance |
Notre
séjour à Singapour ayant pour objectif la demande de résidence
permanente pour Deniz, nous nous sommes rendu à la Haute Commission
du Canada qui siège là. C'est à Phnom Penh qu'on nous avait
informé que les demandes de cette nature ne pouvaient être traitée
qu'à Singapour et c'est la raison pour laquelle nous nous y sommes
rendu. Le Canada n'a pas de représentation consulaire ni d'ambassade
au Cambodge, il est simplement représenté par l'ambassade
australienne.
Il
appert que les demandes de résidence permanente ne peuvent être
faites qu'en envoyant tous les documents et formulaires complétés,
par la poste à Mississauga, en Ontario. Nous avons finalement
consacré une journée entière à préparer une gigantesque
enveloppe pleine des justifications pour lesquelles nous sommes sans
domicile fixe (SDF, vagabonds) et pourquoi nous souhaitons revenir
nous établir au Québec, de qui nous sommes au juste, puisqu'on ne
semble plus s'insérer dans les formulaires en usage.
Presque l'impression d'être dans le décor d'un tournage |
Heureux
de quitter Singapour après 1 semaine, on est repassé chez
l'adorable Joséphine, souper avec elle. Et Deniz reprenant contact
avec sa moto.
On
retourne lentement jusqu'à Kuala Lumpur puisque Deniz a un
rendez-vous à l'ambassade américaine pour sa demande de visa lundi
le 1er avril. Espérons que le poisson était d'avance cette année,
vu que la baleine administrative canadienne nous a déjà joué un
bon tour.
On
vise de faire la traversée vers Sumatra la deuxième semaine
d'avril, seulement si on a tous les documents requis et l'assurance
de pouvoir expédier les motos de Bali jusqu'en Californie.
Les
bécanes vont faire un très grand tour de bateau et nous, on se fera
pas prier pour se jeter à l'eau chaque fois que l'occasion se
présentera. Peut-être pas dans l'eau bouillante des volcans encore
en activité sur une des 17 000 îles indonésiennes, mais il
paraîtrait que les plus beaux sites de plongée sous-marine au monde
se trouve autour de se continent disséminé dans l'océan. On verra
bien!